dimanche 13 avril 2014

Chronique : seahaven - Reverie Lagoon: Music For Escapism Only


Sauf si tu vis dans une grotte qui capte même pas le réseau 2G et que tu ne portes pas de veste en jean, tu dois sûrement connaître seahaven rien que de nom. Même dans un concert de Mon Autre Groupe j'ai vu un type porter un t-shirt de ce groupe, dont le nom s'écrit tout en minuscules, comme iwrotehaïkusaboutcannibalisminyouryearbook, alexisonfire, ou blessthefall (pardon)... Tu as sûrement vu ce nom passer sur Tumblr au travers d'un fan-art illustrant des lyrics de leurs chansons. Vous avez aimé le premier disque, Ghost, brut de décoffrage, mélange de cris éraillés et de chant sensible, raffiné et passionné ? Vous avez aimé Winter Forever, qui se voulait plus "indie", moins criard, voire même plus "juvénile" ? Eh bien hop, le groupe change quasi-totalement de style sur son nouveau disque. Fini le post-hardcore brumeux qui oscille entre Thrice et Brand New, fini le pop-punk teinté d'indie, on joue ici dans une autre catégorie, bien plus atmosphérique. En fait, tout est résumé dans le titre ce de nouveau LP : Reverie Lagoon: Music For Escapism Only.

D'entrée de jeu, on est averti : On est pas ici pour casser du bout de gras, mais plutôt pour rêver, s'évader, sous de légers accords vaporeux, sous un ton de voix grave, traînant, doucement, s'éclaircissant au gré des courants de cette musique presque... aquatique ? Du post-hydrocore ce serait rigolo à inventer, tiens. Carapuce au chant, Tortank à la batterie, Psykokwak à la guitare et Poissirène à la basse. Ouais gros, Pokérock dans les bacs ma gueule ! Oh bordel, et voilà, je me suis encore égaré... Ces aspects nautiques, on les ressent dès l'intro "Fifty-Four", saupoudrée d'une contre-basse et du bruit de l'océan, faisant écho à l'artwork représentant l'aurore sur une plage, illustrant relativement bien le principe d'escapism dont il est question sur le titre de l'opus. Imagine-toi sous cette aurore, sous ces couleurs chaudes, avec la douce brise de l'océan qui te passerait sur le visage telle une douce caresse. Tu vois l'hypnose ? Tu sens cet agréable vertige ? Non, vous n'entrez pas dans un album de shoegaze, vous allez juste découvrir le seahaven cru 2014 : envoûtant au possible, conservant l'aura blues qui a toujours plané au-dessus de leur compositions ("Wild West Selfishness" et son final explosif, qui plaira sûrement aux fans de Thrice...), et nous replongeant même dans des réminiscences de leur passé post-hardcore au travers d'un titre jouant avec le contraste entre couplets dissonants, et refrain quasi pop-punk. On retrouve même le sublime et classieux "Silhouette (Latin Skin)", présent sur l'EP du même nom qui annonçait la couleur du changement de cap musical des Californiens. On y trouve aussi "Solar Eclipse", un déchirant duo piano-voix ou Kyle Soto (chant) se confie, à fleur de peau. "I'm sorry for all of the things that you don't know. I'm everything now that you would never want. If you knew the length of my selfishness". On y trouve également ces deux interludes très planantes : "Paseo De Las Estrellas", ou le chant flirte avec l'emo indie. Dans ce lagon de réverb', dans lequel semble s'être noyé la voix de Kyle sur "Highway Blues", on peut presque parler de psychédélisme. En fait, on dirait finalement l'Alchemy Index de la bande à Dustin Kensrue version seahaven... Puis comment résister à cette chanson d'amour aussi vaporeuse qu'entraînante qu'est "Love To Burn"... "You don't need me, but we'll make believe like you do. Well you don't. I'll be sour, you'll be sweet, it's nothing new. What are you still doing here?"

On ne peut pas s'ennuyer sur ce disque, c'est impossible, ou alors t'es vraiment pas ouvert d'esprit, ma couillasse. Car c'est captivant dès les premières secondes, rien ne paraît jamais longuet car chaque morceau à son petit quelque chose, un petit riff, un petit rythme, un gimmick de chant, qui fait que l'on va accrocher. Et puis pour le coup, c'est très varié musicalement ! Est-ce que j'ai aimé cet album ? Eh bien jusqu'à vouloir le violer. C'est tout simplement BEAU. Ça grimpe à mille lieux au-dessus d'un simple essai Pitchfork indie d'un jeune groupe emo un peu prétentieux, c'est un vrai travail de fond, ça fait la nique à tout les teenagers qui attendaient un nouveau skeud à la The Wonder Years, c'est un bond en avant de maturité qui a été atteint, et ça se sent dans le boulot de composition. Prenez par exemple "On The Floor", qui si il passerait à la radio fisterait avec violence n'importe quelle ballade connue de groupes de rock radiophonique.

FUCK YOU ALL SONS OF A BITCH. Ceci était un message de ma collègue de travail qui voulait pimenter ma chronique en pleine rédaction à ce moment-là, et que j'ai d'ailleurs rendue fan de ce disque en le passant au taff. Bref, seahaven a ici réussi à s'émanciper des carcans forgés petit à petit par les groupes de chez leur label Run For Cover Records, pour trouver sa propre voie, et viser un public plus large. En dehors de cela, ce disque permet une vraie re-découverte des américains, dans un domaine ou on ne les attendaient pas forcément. C'est un vrai voyage, et un échappatoire réussi. Il me tarde de voir ce que donnera en live l'alchimie de ces nouveaux morceaux et de leurs chansons plus électriques...

"Someone left you looking for a reason.
Found it in the Reverie Lagoon
Hate to see you lose you in illusion
Don't forget who's watching you."


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