Bon, à celui qui me trouvera qui a ouvert une usine à albums français sur notre scène depuis quelques semaines, parce que la c'est sans arrêt.
Aujourd'hui, je fais donc la chronique du premier album d'un groupe français tout récent :
Cathedraal. Ce groupe s'est formé sur les cendres de
Madame De Montespan, un groupe screamo françilien passé bien trop inaperçu. et pour ma part, découvrir que Madame a une deuxième vie fut une très bonne surprise, surtout que j'ai appris la nouvelle par hasard en me balladant sur Internet. Alors je préfère vous le dire tout de suite : À l'écoute de ce CD, je pensais tomber sur quelque chose de sombre, réfléchi et intense, dans la tradition du genre en France, et dans la continuité de Madame de Montespan. Mais je n'aurais jamais imaginé sombrer aussi loin. Cet album m'as vraiment impressionné. J'en suis ressorti bouleversé. En écoutant cet album, j'ai eu l'impression de voyager dans une forêt sombre de Transsylvanie, et d'y faire une halte dans une cathédrale abandonnée, ou les âmes perdues et des hommes désespérés s'y retrouveraient,
s'amuseraient entre eux pour faire passer le temps, le tout dans la pénombre, dans un univers funèbre, loufoque. Comme si Tim Burton avait choisi de faire une bande-son screamo pour un film. Cet album est un voyage a lui tout seul. Je vous y emmène?
L'album commence donc par Sasha, une intro instrumentale. Un début calme, mélodique, avec une guitare sale et un son façon vieux vinyle. On entre doucement dans le vif du sujet. Des harmonies de violon viennent delicatement couvrir l'ensemble. Ça sonne mystérieux et inquiétant, une superbe mise en bouche... Le fil conducteur de l'album est tissé, nous voilà prêt à passer dans le vif du sujet. On passe sur "Quelque part à l'est : Babi Yar" : ça commence mélodiquement, et progresse doucement jusqu'à un post-hardcore torturé, planant et mélodique. Et dès le début le chant typique des classiques du screamo français, depuis Sed Non Satiata, ça ne se faisait plus! Elle oscille entre clarté, cris et braillements, une désespérance profonde en ressort, le tout avec une maîtrise pas banale. Ça sonne vraiment bien, et bien différent. Et puis cette ambiance qui se dégage... Une plongée dans les ténèbres, énonciatrice du chaos. Et VLAN, "En Crimée", un putain de chaos nous explose à la gueule, une violence cathartique, un parfait miroir aux paroles crues et sans pitié, je peux notamment citer "Misérables chiens galeux, entassez vous dans la merde, insolentes chairs purulentes, cachez vos sexes hideux". Un rejet de l'Humanité comme on le retrouve souvent sur la scène black, avec ce feeling screamo qui en rajoute davantage. Allo, deafheaven? Ça respire la haine, le chant est totalement fou. Je ne m'attendais pas du tout à tomlber sur un tel morceau. On sent bien que l'on ne se cantonne pas à du screamo, mais que les gars nous baigne aussi dans du hardcore limite chaotique blackisé, du plus bel effet. Et de tout cela ressort une belle fin mélodique. Toujours ce début calme et inquiétant sur "Je ne t'ai pas défendu". De lourdes notes de piano viennent s'ajouter au son. Le chant est prenant, doux, clair, mais ténébreux. Le tout est très planant, finalement. Plus l'on avance, plus le chanteur nous hurle sa peine. Et voilà l'apothéose : une envolée post-hardcore, le chant explose. Le tout sonne toujours crasseux et noir, on ne voit jamais la lumière, de toute façon ça servirait à quoi, on y est si bien dans ces ténèbres, laissons-nous aller. Justement, voilà le titre du morceau suivant : "Laisser aller". Toujours ce départ calme et lourd. hypnotisant, enchaînant ensuite sur ce chant très varié et possédé, et une lourdeur pas possible des instruments. On est balancé violemment entre lumière et ténèbres. Et voilà qu'au milieu du morceau, un violon vient poser le tout, les guitares se calment. Et la, surprise, un orgue, messieurs dames! Mais ça donne un rendu sublime! Et donne un côté un peu transylvannien et morbide au morceau, qui finit ainsi. Cet orgue revient souvent tout le long de l'album. Le morceau suivant est sans doute le plus violent et noir de l'album, "Dieu ne croit plus en nous" : Départ ténébreux, encore et toujours. On n'y sort pas, on s'y enfonce. Ce morceau est vachement doomesque, limite flippant. En tout cas, il donne vraiment envie de réfléchir, ou nous l'oblige, plutôt... Le morceau se finit doucement, sur une guitare qui nous laisse un répit. Une dernière chance... Et voilà qu'arrive "Rouler les peaux mortes" : toujours ce ton lourd et sombre même si on tombe dans un morceau plus mélodique, cette voix torturée, et les explosions de guitares qui soulèvent le tout. Les paroles sont magnifiques et recherchées, ce qui ne change pas de l'ensemble de l'opus, voire de ce qu'on pouvait constater avec Madame de Montespan. Le suivant sur la liste est "Des noms sur des valises" : Un constat amer sur l'Homme, sur ce que les dirigeants, les vendeurs, les vendus font de nous. Le tout sur une instru qui aurait sa place dans un film de Tim Burton (surtout grâce au jeu de basse énorme dans le genre). Le chant nous surprend encore davantage, poussé au plus clair. Et voilà que le morceau se termine avec une instrumentation lourde, avec de belles nappes de violon. Je me laisse complètement happer par l'ambiance et ce nouveau constat. J'en veux encore! Alors voilà "Je l'aimais encore" : On démarre avec une mélodie déchirante, un cri du même accabit. Ici, on parle d'un amour perdu, un homme désespéré d'avoir perdu sa moitié. Une douce montée en puissance avant l'apothéose, une apothéose onirique. Ce morceau est toujours triste, mais on croit y voir un peu plus la lumière, paradoxalement. Une façon de dire que l'amour peut-être merveilleux, mais aussi tellement assassin... Un petit bijou du genre. Et enfin, un de mes chouchous, "Les arbres en témoignent" : Alors la, coup de coeur perso. Une instru tout droit inspirée de Sed Non Satiata. Sauf qu'ici, les paroles sont bien plus crues. Et puis tellement belles. Le thème des arbres m'as tout de suite séduit (aah, ces fameux arbres nus d'hiver, un des éléments naturels favoris de la scène ^^), ainsi que celui de la nature. Le chanteur est à bout de souffle. Il nous crache son venin jusqu'au dernier souffle, justement. On le sent impliqué dans son propos, très concerné. Comme tout au long de l'album. Et niveau musique, c'est toujours cette ambiance qui caractérise bien l'univers de Cathedraal, qui noie l'auditeur.
Conclusion : bouleversant. Ce mot me suffit à décrire ce premier album vraiment réussi. Cet opus plonge l'auditeur dans une ambiance vraiment particulière, un parfait miroir aux thèmes abordés dans les textes noirs et pleins de vérités. Ici, on est en quête d'amour, de haine, de libération. Le tout sonne à la fois mélodieux et très atmosphérique à la manière d'un Sed Non Satiata (au niveau du chant, il y a une flagrante similitude), et à la fois très sombre, chaotique, mystérieux et lourd, une lourdeur des instruments que n'aurait pas renié Cult Of Luna, qui m'évoque même les chemins musicaux les plus rugueux de Thrice. Et tout le long de cet opus, il y a tout un lot de mélodies, de riffs, et surtout cet orgue majestueux, inédit dans le genre mais putain, tellement évident, qui nous évoque un univers loufoque, un joyeux monde de l'au-delà qui s'amuse de la noirceur, du chaos, encore une fois un univers Burtonesque. Je ne sais pas si c'est fait exprès, mais c'est comme ça que je le vois. Cela accentue le côté dramatique, funeste des morceaux, et rajoute encore plus aux ténèbres, au mystère, et surtout dans le constat dans lequel "Voix Blanches" nous plonge. Un disque vraiment à part sur la scène, qui je l'espère va faire des émules, tant il ne ressemble à aucun autre dans son instrumentation, et sans doute aussi dans sa recherche artistique. À noter que le disque a été enregistré dans une grange. On sent énormément l'influence que cela a eu sur les morceaux. La production un peu raw, la sincérité du tout, l'ambiance, le boulot des musiciens... Ça aussi, ça a forcément joué dans leur quête artistique, vraiment bien réussie, à mon avis...
Allez, mes ami(e)s, faites-vous plaisir, le monde des ténèbres vous souhaitent la chaleureuse bienvenue.
Tracklist :