mardi 3 juillet 2018

The Flying Worker! : skramz en ceinture blanche, lutte des classes en ceinture noire.



Quand on pense au screamo français, on pense tout de suite aux mêmes noms, instinctivement : Daïtro, Amanda Woodward, un peu Belle Epoque, curieusement Gantz alors que ça tient plus du post-metal... Des groupes qui ont été influents bien au-delà des caves du terroir : des USA au Japon, ces quelques groupes ont été déterminants sur l'évolution de la scène. Mais il y a eu d'autres groupes, tout aussi importants, qui sont malheureusement soit tombés dans l'oubli, soit n'ont pas eu la même exposition sur les internets, voire sur la scène elle-même. Beh ouais, en vrai, à part les personnes qui suivaient assidûment le roster Stonehenge Records, les forums genre Awesomeboard ou Warmzine (Emo France aussi un peu), où celleux qui n'avaient pas peur d'aller voir régulièrement des concerts de punk hardcore estampillé "emo" dans des caves il y a 15-18 ans, qui saura parler instinctivement de The Flying Worker! ? Ah bah, peut-être ces emo nerds qui ressuscitent le temps d'un article des groupes oubliés, parfois ne dépassant pas une année d'activité, dont tout le monde avait oublié l'existence... Et ça tombe bien, j'en suis à moitié : J'aurais pas été capable de citer instinctivement The Flying Worker! avant de m'y replonger ces derniers jours et d'écrire ce papier. Mais je suis "le dictionnaire de l'emo", et parler de ces noms tombés dans l'oubli et vous donner une chance de ne pas passer à côté, c'est l'une de mes missions à la base ;) !

The Flying Worker! venait de Rennes, ont été actifs entre 2002 et 2004, et ont sorti 2 splits (un avec The Death Of Anna Karina et un autre avec Seven Feet Four), un 7" et une démo, à peu près la moyenne d'un groupe de screamo en termes de releases, quoi. Mais ils avaient un petit truc en plus par rapport à leurs camarades de scène, je pense. Sans surprise, ça piochait allègrement chez Orchid et Ampere, mais j'ai l'impression que le courant sasscore (tu peux retracer l'histoire de ce sous-genre par ici, mais grosso modo ça correspond à la scène Blood Brothers / An Albatross / Daughters) qui grandissait en parallèle aux USA) les ont aussi un petit peu influencé. Sur les morceaux du self-titled 7" notamment, avec ce synthé assez pesant mais dansant en même temps, qui ponctue les morceaux du disque, en n'enlevant rien de la sève emoviolence de leurs morceaux...

Je me souviens avoir écouté ce groupe il y a pas mal de temps et avoir vite abandonné car je trouvais que le synthé gâchait tout : grave erreur. J'étais un peu trop puriste de la formation classique d'un groupe de punk. Il y a peu de temps, je me suis pris-e d'amour pour The Book Of Dead Names (plus ou moins la suite de Song Of Zarathustra), qui joue aussi de ce screamo sassy sur les bords avec le même genre de claviers, ça m'a préparé-e à ma re-découverte de The Flying Worker!, j'ai vachement plus accroché que la première fois où je suis tombé sur leurs morceaux... Les rennais me font pas mal penser aux américains, avec un tempo plus rapide, une atmosphère plus violente encore, proche de la scène screamo d'Amherst comme je disais plus haut, avec en plus cette fibre politique radicale que partageaient à la même époque des groupes du même niveau en termes d'exposition sur la scène comme Hyacinth, Farewell... J'y retrouve en tout cas la même fougue musicale, la même hargne, le même côté "déter" dans les textes. Et c'est bieeen bien cool. Et comme c'est des goths certifiés, ils ont repris "The Truth" de New Order sur le S/T 7".

Petit point #hype (ou paparazzi, à vous de voir) : dans ce groupe, il y avait Hugues Pzzl à la batterie, qui officiait chez les merveilleux 12XU, les non moins excellents mais plus vénères Baron Noir ("RIEN N'EST VRAI, TOUT EST POSSIBLE !"), la méga-masse noire de type "patate cloutée dans la tronche" nommée Veuve S.S (d'ailleurs, même si je sais que y'a rien d'ambigu, qui pour m'expliquer ce nom un peu chelou ?), qui fait toujours des illustrations et du design, et qui aujourd'hui joue dans Dewaere, et tient Nosun Media, une petite affaire de production de merch et de disques.

Lyricalement, comme je le laissais deviner plus haut, bah c'était pas mal axé "luttes des classes" et "casser sa montre" : pas le temps de niaiser, dans le bon sens du terme, sûrement pas pour encourager la productivité des employé-e-s, mais plutôt leur dextérité à tout niquer. Mais y'avait aussi un peu de résignation par rapport à la vie et ce qu'elle nous apporte dès la naissance, ce à quoi elle nous pré-destine tou-te-s. Mais c'était pas pour basculer dans un nihilisme malaisant, mais plutôt pour faire grossir la rage qui ressort de textes comme la géniale "The working class goes to heaven" :


- "Clock-cop clock-cop, the cop in the clock still knocks at my last dream but I won't be late at sleep one more time.
Your tomorrow will not kill my today now, not anymore.

I am flying, I am flying over me, a god is dancing in me."





Je suis vraiment désolé-e, mais j'ai uploadé la vidéo sans faire attention à l'ordre des morceaux... En fait, c'est pas dans l'ordre chronologique. Mais c'est pas très grave en soi, non ?

J'espère vous avoir permis-e de vous prendre une bonne claque avec ces morceaux qui sortent un peu de l'ordinaire, dans le screamo. La musique de ce groupe continue d'avoir de l'impact aujourd'hui : c'est notamment l'une des principales influences de The Ultimate Screamo Band. Ces morceaux n'ont pas pris une ride, et d'autant plus maintenant que les sonorités synthétiques font leur retour dans le punk hardcore. Tu auras du mal à trouver ce disque autrement que sur Discogs aujourd'hui, mais si tu veux vendre le tien, je suis client-e.

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