vendredi 24 juillet 2015

Loma Prieta revient en Octobre avec "Self Portrait".



Présentement, on dirait un groupe d'indie-rock anglais formés de hipsters prétentieux aux goûts vestimentaires parfois douteux. Mais non, il s'agit bien de Loma Prieta, l'un des meilleurs groupes de screamo de ces dix dernières années, et il s'apprête à sortir un nouvel album. 3 ans après l'énorme (et inaudible en live) IV et le split avec Raein paru en 2013, le trio sortira le 2 Octobre prochain son cinquième album, Self Portrait. On a eu le droit à un petit descriptif de l'album sur la page Facebook du label de la bande, Deathwish Inc., et ça met quelque peu l'eau à la bouche :

"Self Portrait is the latest album from Loma Prieta; a ten-song masterwork recorded by Jack Shirley at The Atomic Garden Recording Studio (Deafheaven, Whirr, etc.). Opener "Love" layers unorthodox melodies amid a tangle of pensive, despondent vocals. These humanly complex qualities loudly bleed into every aspect of the album. Driven by feedback-drenched guitar work "Black Square", "Roadside Cross", "Net Gain", and "More Perfect" veer from one post-everything sub genre to the next, leading to the beautifully skewed "Nostalgia", a song that creeps from the haze with dark harmonic leanings. "Never Remember", "Merciless", and "Rings" venture down a similar crash and bang path before closer "Satellite" takes flight. An emotional epic that delves deep into introspection before finding total sonic obliteration."

Je fais confiance à vos notions d'anglais, au pire Google Traduction vous filera un coup de main. En attendant cet album, le groupe nous fait plaisir : l'un des titres du nouvel album, "Love", est d'ores et déjà disponible sur un 7" qui contient également un titre qui n'a pas été retenu pour l'album, mais qui a été composé pour celui-ci, avec le même producteur : "Trilogy 0 (Debris)". Cet EP reste dans la même lignée que l'album IV, mais cependant chaque titre est différent. "Love" fait dans la mélodie, dans un screamo plus léger qu'à l'accoutumée, alors que "Trilogy 0 (Debris)" reste dans un élan plus chaotique, bien qu'en délivrant des mélodies tout aussi éthérées et lacrymales, presque plus que jamais. Il y a même quelques parties de chant clair ! C'est vraiment chouette, ça se commande par ici, et ces deux titres s'écoutent ci-dessous, où vous trouverez l'artwork et la tracklist de Self Portrait, dont les pré-commandes seront lancées bientôt. Et petit bonus, vous trouverez également les dates de la tournée européenne du groupe. Une seule date est prévue en France, le 19 Août avec Touché Amoré et Newmoon. Soyez au rendez-vous !






1. Love
2. Black Square
3. Roadside Cross
4. Net Gain
5. More Perfect
6. Nostalgia
7. Never Remember
8. Merciless
9. Rings
10. Satellite



vendredi 17 juillet 2015

PASTEL t'en fera voir de toutes les couleurs avec "L'Acchiappanuvole".


Je parle d'en voir de toutes les couleurs, et voilà une photo en noir et blanc... COMPLOT. Mais non, ce n'est pas une musique uniquement sombre et désabusée que vous découvrirez avec PASTEL ! Ce duo nous provient d'Italie, et est actif depuis 2013. Après un split avec Merridew où figure le titre "Laminal", qui m'avait fait comprendre que le groupe avait un quelque chose de plus que les autres groupes n'ont pas, les italiens reviennent cette année avec leur premier album, L'Acchiappanuvole.

Et sur ce LP, les garçons nous délivrent un panel explosif de couleurs musicales. Aussi euphorique que vivace. Au premier titre, "Il Lancio Kàrmàn", on se croirait sur un album de Nine Eleven, avec cette instrumentation punk hardcore énervée et frontale et ce chant dur et vindicatif. Mais le final plus éthéré fait comprendre que le but des italiens est pas de faire du hardcore politique. En effet, tout le long de L'Acchiappanuvole, on navigue quelque part entre post-hardcore, post-punk, post-rock... Un métronome sonore aux riffs généreux et cristallins, croisés avec des saccades et des instants plus "méchants" (je pense notamment à l’enchaînement "I Love You, Tempesta" et "L'Alchimista"), donnant ainsi à l'univers de ce disque toute sa profondeur. Il faut s'imaginer Raein croisant The Tidal Sleep, et parfois Suis La Lune. D'autant plus que jamais ça ne s'essouffle, on ne finit pas par se lasser, car il y a toujours un élément qui nous fait sursauter, qui aiguise notre curiosité, notre sensibilité... Ceci dit, vous aurez peut-être un peu de mal à rester attentif au chant, dont l'intonation n'est pas celle que je préfère. C'est ce qui m'a toujours empêché d'apprécier pleinement le Rêve de Cassandre de 9/11...

Mais justement, ils semblent s'être penchés sur le problème, en proposant une version totalement instrumentale de cet album. Une riche idée, qui fait ainsi apprécier l'album d'une toute autre manière, sans la colère et la tension du chant, mais avec toute la fougue de l'instrumentation ainsi libre de s'exprimer et de nous enivrer. En dehors de ça, il y a de toute manière une piste dénuée de chant sur ce LP, "La Macchina Cantastorie", au ton bien plus lancinant et pesant que le reste du disque, qui fera plaisir aux plus barbus d'entre vous, bien qu'un glockenspiel et quelques notes de piano prennent soin d'attendrir le bout de gras. Quoique il en soit, c'est ici une très grosse démonstration de force que propose PASTEL avec ce premier long-jeu solide, varié et équilibré. On se plaira à divaguer dans leur univers sucré/salé... Ouais, ça se déguste, et c'est justement aussi coloré et contrasté qu'un arlequin. 

Bisous.





English translation :


I speak of seeing all the colors, and that's a picture in black and white ... CONSPIRACY. But no, this is not only a dark and disillusioned music you will discover with PASTEL. This duo comes from Italy, and is active since 2013. After a split with Merridew which contains the title "Laminal", which made me understand that the band had something more than other bands don't have, the Italian boys are back this year with their first album, L'Acchiappanuvole.

And on this LP, the boys deliver us an explosive array of musical colors. As euphoric as perennial. On the first track, "It Lancio Karman", it's like a Nine Eleven album, with this frontal and edgy hardcore/punk instrumentation, and the vindicative and rude singing. But the ethereal final made it clear that the purpose of the duo is not to make political hardcore. Indeed, throughout L'Acchiappanuvole, we navigate somewhere between post-hardcore, post-punk, post-rock ... A metronomic sound with generous and crystalline riffs, crossed with jerking and tormented moments (I’m thinking of the duo "I Love You, Tempesta" and "Alchimista"), Thus giving to the universe of this record its depth. You have to imagine Raein crossing roads to The Tidal Sleep, and sometimes Suis La Lune. Especially since it will never ran out of breath, we can't be tired because there is always something that makes us jump, which sharpens our curiosity, our sensitivity... That said, you may have a little trouble to remain attentive to the song, whose intonation is not the one I prefer. This is what has always prevented me from fully appreciate le Rêve de Cassandre of 9/11...


But precisely, they seem to have studied the problem, proposing acompletely instrumental version of the album. A great idea, which allow us to appreciate the album in a totally different manner, without the anger and tension of the singing, but with the enthusiasm of an instrumentation free to express herself and take us away. Apart from that, there are anyway a track devoid of vocals on the LP, "La Macchina Cantastorie", a more throbbing tone and heavier than the rest of the record, which will please to the most bearded of you, while a glockenspiel and a few piano notes carefully soften the end of fat. This is a very large show of force that offers PASTEL with this solid and varied LP. You'll enjoy to wander in their sweet / salty universe... Yeah, this record is savorous, as colorful and contrasting as a harlequin.

XOXO.

jeudi 9 juillet 2015

Gulfer ont joué au Fluff Fest, mais tu ne les connais toujours pas.


Ouais, ces mecs, c'est ce genre de groupes que l'injustice frappe de plein fouet, ils jouent la formule emo/math-rock de manière plus intéressante et plus chargée émotionnellement que pas mal de monde actuellement. Permettez-moi de vous présenter messieurs dames les québécois de Gulfer. J'avais déjà écrit un bref paragraphe à leur sujet sur le focus que j'avais rédigé sur la scène locale. Mais à l'occasion de la sortie de leur nouvel EP What Gives, j'avais envie d'en écrire davantage, parce qu'ils le valent bien, et que personne ne les écoutent assez.

Depuis 2012, le quartet foule les terres du math-rock aromatisé à l'emo, en ayant débuté sur un split avec les français de Fago Sepia, l'ancêtre de Mermonte. 3 ans plus tard et une série d'EP et d'autres splits plus tard, les voilà donc revenus avec 7 titres ou les garçons ont rendu leur emo/math-rock plus rugueux, presque plus triste, mais pas moins rythmé, enjoué et "tricoteur". De plus, tout mes potes disent que ce sont des mecs super sympas. Mais le problème, c'est que jusque là, PERSONNE n'en parle. Ou alors trop peu de monde. Ces mecs ont pourtant joué au Fluff Fest l'an dernier, et tournent pas mal malgré qu'aucun mec du groupe n'ai le permis de conduire. Alors que, en toute subjectivité : ça défonce. Je suis fan de cette voix malgré sa justesse très aléatoire, ce grain, ce petit vibrato qui ajoute un ton mélancolique. Avec The Most, c'est l'un des trucs les plus cools que j'ai découvert dans le style depuis longtemps. D'ailleurs, oui, il y a là aussi de la trompette.

Si même Topshelf Records a pris soin de sortir leur split avec Del Paxton, que Sport disent du bien d'eux, et que malgré tout ils continuent à se faire snober, c'est que ça commencera à devenir grave. Fais-toi plaisir et accompagne le soleil qui réchauffe la peau et les cœurs cet été avec cette musique réconfortante, avec de l'âme, des tripes et un doigté de qualité, parfait en attendant le nouvel album de Toe.

Bisous.





English translation:

Yeah, those guys is that kind of band that injustice has hit, they play an emo/math-rock formula  more interesting and more emotionally charged than many bands currently. Let me introduce you ladies and gentlemen the Quebecer band Gulfer. I had already written a brief paragraph about them on the focus that I had written about the local scene. But on the occasion of the release of their new EP What Gives, I wanted to write more, because they are worth it, and nobody listen enough to them.

Since 2012, they tread the lands of math-rock flavored with emo, having started on a split with the french band Fago Sepia, the ancestor of Mermonte. 3 years later and a series of EP and other splits later, they returned with 7 titles or they boys made their emo / math-rock rougher, almost sad, but no less rhythmic, playful and "knitter". In addition, all my friends say they are super nice guys. But the problem is that so far, NOBODY speaks about them. Or too few people. These guys have played Fluff Fest last year, and they play several shows across USA and Canada, even if no one in the band have his driving license. While subjectively: it smashes. I'm a fan of this voice despite his very random accuracy, this grain, this little vibrato which adds a melancholy tone. With The Most, it's one of the coolest things I've discovered in the style since a long time. And yes, there's also trumpets in this EP.

If even Topshelf Records takes care of releasing their split with Del Paxton, that Sport speak well of them, and yet they continue to be snubbed, it will start to become problematic. Treat yourself and accompanies the sun which warms the skin and hearts this summer with this comforting music with soul, guts and good fingering, perfect pending the new album of Toe.

XOXO.

lundi 6 juillet 2015

Live report : Chaviré + Cruise On The Styx + Coupure @ Le Gambetta Club, Paris, le 26/06/2015



Tu l'as vue, cette fameuse image du mec complètement en osmose qui boit tranquillement un thé dans son mug blanc au premier rang d'un concert d'un groupe de post-rock nommé Braveyoung ? Eh bien en ce 26 Juin au soir, j'ai vu des mecs faire de la cuisine vegan sur le côté de la scène pendant un show punk-hardcore, les marmites faisant du collé-serré avec les amplis. L'illustration assez hallucinante d'une pression inexistante et annihilée, messieurs dames. Bon, histoire de rendre le truc moins fou, c'était la graille pour les musiciens et l'orga. Nous voila ainsi au Gambetta Club, le bar situé juste à côté de la Flèche d'Or. C'est petit, il fait chaud, la sono est naze, mais c'est assez convivial pour y passer un moment pépouze avec des copains, à boire et de la musique cool. Sauf que moi, j'y suis allé tout seul, ma gêne dissimulée de force sous un excès de consultation de smartphone, mais avec la grosse envie de découvrir les nantais de Chaviré en live. Je voulais voir où en était le screamo pur jus en France, et ce qu'en fait la jeunesse nationale, une catégorie de population qui actuellement est un peu trop laxiste quand à son futur, et qui en cette entité musicale semble (pour une infiniment petite partie de cette jeunesse je le conçois) semble se réveiller. À leurs côtés, Cruise On The Styx présentait son premier EP, et Coupure (punk hardcore parisien avec un membre de Bitpart au chant) allait donner son tout premier concert.

C'est justement Coupure qui a foulé la toute petite scène du Gambetta Club en premier. Et ma foi, ce fût fort sympathique : un punk hardcore mélodique plutôt old school, rappelant parfois pas mal la scène punk française de type Guerilla Asso, et proposant même de surprenants riffs sludge sur l'un de leurs morceaux. Il y avait une bonne énergie, le frontman m'a bien fait marrer avec ses paroles manuscrites qu'il avait pris avec lui pour ne pas les oublier, c'était mignon et honnête. Le level "rien à foutre" comme je l'aime ! Dans le même esprit, le guitariste de Cruise On The Styx était balèze. J'ai écouté quelques bribes de leurs morceaux avant le concert, et ça m'a pas rendu fou... Mais en live, ils ont réussi à attirer un peu plus mon attention. Mais avant tout, y'avait ce gratteux, un mec qui a tout son temps, qui le prenait pour aller aux WC alors que son batteur l'attendait pour débuter le concert. 5 minutes plus tard, il est arrivé sans un mot, réglant son instrument et ses pédales avec amour. Et nous voilà parti pour trois quarts d'heure d'un son plutôt old school là aussi, mais pas marqué par une influence musicale précise, ça va dans tout les sens. Même si c'est à dominante post-punk et garage, on y entend du post-hardcore, du rock alternatif 90's, de la power pop... C'est très riche, et ainsi le concert commença sous les meilleurs hospices. Mais le rythme était dur à tenir pour le duo lui-même, accumulant les pépins. Pas bien grave en soi finalement, mais c'était inévitablement une gêne pour l'immersion dans leur univers sonore. Notre guitariste fantasque et très peu bavard s'est d'ailleurs appliqué à rejouer un morceau en entier, après s'être stoppé un peu trop tôt dans celui-ci, et aura rallongé le set de 10 bonnes minutes. Ça devenait long pour pas mal de monde, et à la fin du set ne restait plus qu'une dizaine de personnes, le restant se trouvant dehors autour d'un verre. C'est vrai que leurs titres s'allongent un peu trop, on se perd vite, et c'est dommage parce que comme je le dit plus haut, il y a de la richesse dans leur musique. Un potentiel à développer, et je demande à les revoir, il me rend curieux ce frontman peu loquace. En tout les cas, ce concert a plu à un fan de Booba qui a dû tomber par hasard sur le concert de ce soir au travers d'une errance désespérée dans les rues de Paris, rassurant le batteur sur sa prestation de ce soir d'un très solennel "t'inquiète rhey !".

Avec Chaviré, ce fût une toute autre ambiance. Ça parlait beaucoup plus, et c'était des choses qui se doivent d'être dites. Le discours est déjà fort sur disque, il l'est d'autant plus en live. D'autant plus que c'est ici un groupe dont la moyenne d'âge est à situer dans la vingtaine, et qu'ils ont déjà beaucoup de choses à hurler sur la situation sociale et politique de notre pays. Ouais, Chaviré, c'est le screamo politico-social tel qu'on ne le fait plus depuis qu'Amanda Woodward a rendu les armes en 2006. C'est toute cette scène-là, Belle Epoque, Aghast, peut-être même Anomie, qui influence clairement les garçons, et ce jusqu'au merch totalement DIY et vendu à prix libre, avec notamment un bien beau livret pour accompagner leur démo. Bisous au totebag avec le logo pompé sur celui d'Orchid, et les stickers à l'effigie de la cover du S/T d'Embrace, sauf qu'au lieu d'Embrace bah c'est écrit Chaviré. Je vous rassure (et vous le savez peut-être déjà si vous avez lu ma chronique de leur démo), les garçons ne nous servent pas un copié-collé de X ou Y. On reconnait le fleuron de la scène française certes, mais seulement sur quelques plans, pas dans toute la consistance. Ils nous ont joué trois morceaux de la démo, une reprise du groupe SSD que j'ai du coup découvert ce soir-là, et deux nouveaux morceaux qui vont musicalement encore un niveau au-dessus de leurs compositions actuelles, à la plume affûtée comme une lame de rasoir, celle qui vient trancher à vif l'apathie et l'hypocrisie ambiante. Une rage de vive et de vaincre qui m'a touché, et qui m'a carrément inspiré. J'ai reconnu tout ce que j'aimais dans le screamo, et ça m'a fait plaisir de voir que les fumerolles qui s'élèvent péniblement depuis des années dans les arrières-salles parisiennes se sont ici ravivées. J'attends impatiemment la suite de leurs aventures !

Bisous.





samedi 4 juillet 2015

Avec ALTA LOMA, Bien à Toi crée la "transcendanse".



Dans le cadre du championnat de France de la musique instrumentale, chaque participant s'est relativement bien illustré durant la saison 2014/2015. Totorro, Jean Jean, Mermonte, Man Is Not A Bird, Grand Détour... Tous ont désormais sorti leur premier album, chacun dans des styles très variés, de l'orchestre math-pop aux effluves shoegaze en passant par l'emo-punk instrumental ou l'électro rock déjanté, assurant pour la plupart la première partie de groupes mythiques, ou voire même carrément extérieur à l'univers alternatif : The Dillinger Escape Plan, Ride ou Yelle, entre autres. Oui oui, elle. et là, c'est elle aussi. Il y a même un challenger hors-catégorie qui est venu s'inviter sur le terrain et qui a réussi à faire sur 9 rounds ce que toute la scène française a timidement tenté sur quelques riffs mais sur plusieurs saisons : du math-zouk, sous le nom de Francky Goes To Pointe-à-Pitre... Et le pire, c'est que c'est génial. Mais une équipe semblait être restée sur le banc, bien décidée à ne rien en avoir à foutre des règles du jeu, et à prendre son temps plutôt que de risquer la relégation : il s'agit de Bien à Toi.

Fondée en 2011, cette formation parisienne écume tranquillement les arrières-salles et les sous-sols français, et a sorti deux EP, Diriger, Séduire, Convaincre et La Faiblesse, des soundscapes troubles et intimistes, où le groupe se cherchait, mais en profitait en même temps pour tout défoncer. C'était à cheval entre post-punk, post-rock, drone... Et même un peu de screamo. Mais ce dernier élément, le trio n'en a désormais plus besoin. Fini les complaintes, les garçons ont d'autres armes en main pour exprimer la peine, pour nous la faire ressentir, tout en prenant soin de nous faire nous sentir bien, détendu, ailleurs. Sur ALTA LOMA, le trio s'est trouvé une base musicale qui leur correspond mieux, où le but est de réussir à nous faire danser en pleurant.




Avec les deux précédents disques, j'ai écrit des chroniques assez abstraites dont je suis encore assez fier aujourd'hui, me rendant compte que cela va tout à fait de pair avec la démarche artistique du trio. La première est lisible par ici, la seconde par là. Alors même si je sens que je n'ai pas la même inspiration que pour ces deux écrits, j'ai choisi de rester sur le même ton pour vous raconter ce premier LP, tout aussi complexe à appréhender que le fût les deux précédents opus. Les garçons aiment jouer avec nos tympans, nos nerfs, nos âmes. J'y ai toujours trouvé une sorte de minimalisme dans leur musique, ça ne part jamais en explosions de tremolo-picking et en cavalcades de batterie, il n'y a pas de progressions classiques toute en delay/réverb', autrement dit ce n'est pas du post-rock lambda, et c'est là tout l'intérêt. Oublie la neige, les ours et les arbres, il s'agit chez eux de nous construire des paysages quelque part entre chaleur et brume, à l'aide de mélodies sèches et mélancoliques, de saccades et de boucles. Et de temps en temps, des riffs dissonants et lourds, mais jamais quand tu t'y attends, un peu comme un coup de tonnerre sous la chaleur écrasante d'un jour d'été moite. Le groupe a bien compris que leur musique avait ainsi la capacité de captiver, d'hypnotiser l'auditeur, sans passer par la facilité, ni un schéma musical commun. C'est ainsi cette caractéristique qu'a choisi de clairement mettre en avant Bien à Toi sur ALTA LOMA.

Comment réussir à transcender l'auditeur, le marquer, tout en lui faisant battre la mesure du pied ? Comment le faire voyager avec de simples boucles ? Ce LP nous apporte la réponse. Il s'agit de jouer sur les bonnes tonalités, de les amener avec des progressions riches en sonorités électriques, acoustiques, aussi bien douces que tribales. Pour s'assurer de ne pas perdre l'auditeur d'entrée de jeu, "Vestale" ouvre le disque sous les mêmes cieux que ceux qui recouvraient les EP. Un calme rassurant, teinté d'une sorte de mélancolie pesante mais confortable... Oui je sais, c'est bizarre. Tu sais, c'est comme ces moments ou tu es posé dans ton lit ou ton canapé, quand tu réfléchis un peu à tout et à rien, et que quand tu penses au passé, tu es pris de nostalgie, mais que ça te fait sourire. Il y a toujours cette envie de donner du rythme à la tristesse quotidienne, celle ou l'on se complaît, à lui donner de la chaleur. A illustrer le soi, en fait. Le nom du groupe n'est ainsi pas anodin. D'ailleurs, tout cela trouve son sens lorsque l'on s'interroge sur l'origine du nom de l'album : c'est une référence au roman "Ask The Dust" de John Fante : Arturo Bandini, le héros du roman, erre dans les rues sous le soleil écrasant de Los Angeles et divague dans sa chambre de l'Alta Loma Hotel. Écrivain en quête de gloire, génie auto-proclamé et crève-la-dalle, Bandini est la figure de l'homme victime d'une vie moderne qu'il n'a pas choisie. Bon, je vous avoue que je n'ai pas lu le bouquin, je me suis plutôt contenté de citer le promosheet du groupe... "Vestale" s'achève sur un riff lancinant, nauséeux, qui se répète. On a déjà commencé à se laisser plonger en soi, et il ne s'agit là que du premier tableau... S'agirait-il de vite se noyer ? "0°C" semble ainsi être la tasse que tu vas boire. Une tasse de café, celle qui te fait du bien tout les matins, dans la froideur ambiante. D'ailleurs, les parisiens avaient sorti une version prototype un peu plus froide de ce single l'an dernier, pour préparer son public à son évolution stylistique, pour se tester soi-même. Un morceau qui met bien en avant les principales caractéristiques de ce premier album : des beats dansants, un ton général mélancolique tout en restant chaleureux, et une basse qui pèse un sacré quintal sachant parfois se jouer en douceur.

L'une des grandes forces de cet album, c'est les parties acoustiques présentes dans 8 morceaux sur 10, donnant aux cieux de l'univers musical des parisiens de nouvelles couleurs, apportant également un peu de fraîcheur dans ces plaines désertiques arides, ou s'érige des "Dunes" au sable doux, mais au soleil aveuglant. Une douceur fourbe. Tout au long d'ALTA LOMA, c'est finalement un kaléidoscope aux couleurs pâles qui se dessine : on y retrouve fatalement le noir et le blanc, mais aussi le bleu, le beige, le jaune, le rouge, les couleurs violacées d'un soleil couchant. Et notamment un "Vert-de-gris" pourtant flamboyant, où ce riff noyé sous un effet chorus sonne aussi trouble qu'un mirage dans le désert, et où les rythmiques post-punk prennent une vraie place. L'album est notamment représenté par un titre éponyme long de 8 minutes, divisé en 2 parties, l'une où l'acoustique prédomine, et l'autre plus électrique et dissonante, formant un ensemble toujours envoûtant. Plus l'on écoute le LP, plus sa richesse se dévoile. Ça ne sert strictement à rien de ne l'écouter qu'une seule fois pour s'en faire une idée, c'est impossible, ou alors tu travailles chez Pitchfork. Mais après des dizaines d'écoutes, il y a une piste avec laquelle j'ai encore du mal, où les boucles sonores du trio me paraissent un peu faibles : "Ice is for eagles", qui dénote avec le reste du disque dans le sens ou ce titre est plus creux que les autres, moins passionnant.

Mais sinon, c'est dans l'ensemble une réussite, et cela me satisfait grandement, en tant que fan de la première heure de Bien à Toi. Les parisiens ont consolidé les fondations de leur son atypique, en variant leurs atmosphères et les instruments utilisés. Ça ne ressemble à rien, et c'est d'autant plus remarquable. Un beau moment d'abstraction, d'évasion, qui va au-delà des conventions. Je tiens à dire qu'il est quelque peu tombé à point nommé dans mes oreilles, et m'a fait beaucoup de bien. Pour la troisième fois, merci les petits gars.

Bisous.





English translation :

As part of the championship of France of instrumental music, each participant has pulled out of the game during the 2014/2015 season. Totorro, Jean Jean, Mermonte, Man Is Not A Bird, Grand Détour... All these bands have now released their first album, each in a variety of styles, from math-pop orchestra to shoegaze ocean, from instrumental emo-punk to crazy electro-rock, assuring the first part of important names, or even downright external to the alternative rock universe: The Dillinger Escape Plan, Ride or Yelle, among others. Yes yes, this girl. Her too. There's even an off-class challenger who invited themselves on the field and managed in 9 rounds a thing that all the French scene timidly tried on a few riffs but on several seasons : the math-zouk music, under the name of Francky Goes To Pointe-à-Pitre... And guess what, it's great. But a team seemed to have remained on the bench, determined to still don't give a single fuck about the rules of the game, and take his time rather than risk a relegation: Bien À Toi.

Founded in 2011, this Parisian trio foams quietly the back wards and French basements, and released two EPs, Diriger, Séduire, Convaincre, and La Faiblesse, some intimate and troubled soundscapes, where the band trying to find himself, but profited to the situation for taking the throne of post-stuff game in Paris. It was somewhere between post-punk, post-rock, drone ... and even a bit of screamo. But the trio don't need this now. No more complaints, the boys have other weapons on hand to express the trouble, to make us feel it, while taking care to make us feel good, relaxed, elsewhere. On ALTA LOMA, the trio found a musical core that corresponds them at best, where the goal is to succeed in making us dancing in tears.

The boys like to play with our ears, our nerves, our souls. I've always found a kind of minimalism in their music, it never goes into tremolo-picking explosions and drum cavalcades, no delay/reverb classic progressions, that isn't lambda post-rock, and that's the whole interest. Forget the snow, bears and trees, the guys built us landscapes somewhere between heat and mist, with dry and melancholic melodies, jerks and loops. And occasionally dissonant and heavy riffs, but never when you expect them, much like a thunderclap in the sweltering heat of a muggy summer day. The band has understood that their music had the ability to captivate and, to hypnotize the listener, bypassing ease nor a common musical scheme. Thus, it's this characteristic who Bien à Toi has chosen to clearly highlight on ALTA LOMA.

How to successfully transcend the listener, mark him, while he beat time with the foot? How to make him travel with simple loops? How to successfully transcend the listener, mark him, while he beat time with the foot? How to make him travel with simple loops? This LP gives us the answer : playing on the right tones, bring them with progressions rich in electric sounds, acoustic, tribal and sweet at the same time. To make sure not to lose the outset listener, "Vestale" opens the record under the same skies as those that covered the EPs. A reassuring calm, tinged with a kind of heavy but comfortable melancholy ... Yes I know, it's weird. You know, it's like those moments when you're laid in bed or your couch when you think a little of everything and nothing, and that when you think of the past, you are filled with nostalgia, but it makes you smile. There is always this desire to give rhythm to the everyday sadness where we feel good, to give him heat. To illustrate ourselves, actually. The band name is therefore not insignificant. Besides, all this finds its meaning when we wonder about the origin of the name of the album : it's a reference to the novel "Ask The Dust" by John Fante: Arturo Bandini, the novel's hero, wanders the streets under the blazing sun of Los Angeles and wanders in his room of Alta Loma Hotel. Writer in search of fame, and self-proclaimed genius, Bandini is the figure of the victim man of modern life he didn't choose. Well, I confess I haven't read the book, I simply quoted the group promosheet ... "Vestale" ends with a haunting riff played in repeat, giving a kind of nausea. We have already started to leave plunge in ourself, and it is there that the first tableau... The goal is already to make us drown?  "0°C" seems to be the cup you going to drink. A cup of coffee, which keeps you warm every morning in a cold world. Besides, the Parisian band had released a bit coldest prototype of this song last year, to prepare the public to their stylistic evolution, to test himself. A piece which highlights the main features of this first album : danceable beats, generally melancholic tones who still warm, and a bass that weighs quite loud but sometimes knowing how to play smoothly. 

One of the great strengths of this album is the acoustic parts present in 8 of 10 pieces, giving to the skies of the musical universe of the band some new colors, also bringing some freshness in these arid desert plains, where is erected some "Dunes" in soft sand, but with a blinding sun. A deceitful softness. Throughout ALTA LOMA, it is ultimately a pale-colored kaleidoscope that is emerging: there inevitably finds black and white but also blue, beige, yellow, red, purple colors of a setting sun. Including a "Vert-de-gris" yet flamboyant, where this riff drowned in a chorus also sounds disorder a mirage in the desert, and where post-punk rhythms take a real place. The album is in particular represented by a 8-minutes long track, divided into two parts, one where the acoustics dominates, and one more electric and dissonant, forming an ever-mesmerizing whole. The more we listen to the LP, the more its strength is revealed. It's absolutely not good to listen once to the LP to get an idea of his sound, it's impossible, or you work at Pitchfork. But after dozens of plays, there is a track with which I still have trouble, where the sound loops of the trio seems a little weak: "Ice is for eagles," which denotes to the rest of the disc in the sense that the title is more hollow than other, less exciting.

But otherwise, ALTA LOMA is overall a success, and that satisfies me greatly, as a fan of the first hour of Bien à Toi. The Parisian trio consolidated the foundations of their unusual sound, varying their atmospheres and instruments they used. It looks like nothing, and that's remarkable. A beautiful moment of abstraction, evasion, which goes beyond the conventions. I want to say that it's somewhat timely fallen in my ears and made me much good. For the third time, thank you little guys.

XOXO.