dimanche 18 octobre 2015

Loma Prieta tire de meilleurs selfies que les tiens avec Self Portrait.



Cet album me fait chier. Non pas parce qu'il est nul, mais parce que j'arrive pas à trouver les mots pour commencer ma chronique, alors je t'écris le truc tel qu'il me vient en tête au moment où j'ai enfin l'inspiration pour décrire le nouveau disque de Loma Prieta. En vrai, cet album est vraiment cool. Il représente une suite logique entre IV, un catharsis d'hommes en pleine recherche mentale et musicale, et leur split avec Raein où l'on atteignait les cimes de la violence et de la dissonance. Plus les années avançaient, plus leur musique se noyait dans la saturation, la distorsion. On se demandait alors à quel point nos oreilles allaient siffler avec la prochaine release, et à quoi ressemblerait Loma en 2015, sur le néanmoins très attendu Self Portrait. Alors cet album, un selfie flou d'un groupe qui se serait finalement mis au noisecore, ou un portrait plus clair, à la hauteur de la carrière du groupe ? Il s'avère que c'est tout simplement une sorte de synthèse de ce que les californiens jouent et écoutent depuis 10 ans de carrière. Au final, comme d'habitude avec eux, c'est un disque plus ou moins mélodique mais complexe.

Ouais, ça n'a jamais été fastoche d'écouter un disque de ce groupe, à part avec Last City ou le son en général est très clair, et où la richesse musicale, l'inventivité et la décharge émotionnelle de ce disque en font encore aujourd'hui un indispensable. Mais sinon, aux premières écoutes, pour le commun des punks, c'est soit trop noisy pour apprécier les mélodies, soit trop chaotique en règle générale. Un bon nombre de personnes lâchent ainsi l'affaire, je pense notamment aux kids qui ont l'habitude de les voir en première partie des groupes de la Wave (Pianos Become The Teeth, Touché Amoré...), mais ces mecs n'en ont rien à foutre et jouent ce qui leur plaît. Ils ne sont pas chez Deathwish Inc. pour rien ! Et ce groupe a toujours su trouver son public. Self Portrait, c'est donc un disque où le groupe se confie, où il est lui-même, toujours aussi sensible et passionné, mais sait se faire violence et désordre. Il s'amuse à délivrer des mélodies salvatrices ("Love", "Nostalgia" et ses chœurs d'outro qui surprennent), à brouiller les pistes (l'excellente "More Perfect"),  et n'hésite pas à basculer dans une espèce de garage punk dissonant et cradingue comme sur "Merciless". Du chant clair refait même son apparition (sur Last City, il y avait déjà un couplet chanté sur le morceau éponyme), mais cette fois-ci de manière concrète, donnant avec les refrains catchy et les phases les plus éthérées de ce LP un côté quelque peu rayonnant, quelque chose d'inédit depuis Last City, encore lui. Loma Prieta n'a donc pas sombré dans une noirceur aveugle, mais a su se diversifier, s'ouvrir un peu plus, et porter encore moins d'intérêt aux "codes" du screamo.

Concrètement, en termes de ressenti émotionnel et de musicalité pure, IV était plus accrocheur et plus direct. Peut-être vous souvenez-vous de l'imparable single "Fly By Night" ou de l'incroyable duo "Uniform" / "Uselessness" ? Les refrains et la certaine légèreté qui apparaissent sur Self Portrait doivent en principe combler ce manque, mais on s'était habitué à ce côté plus frontal du précédent disque, qui en faisait le LP le plus brut de la bande. Le groupe avait peut-être besoin de cette "légèreté" dans leur son pour aller plus loin, pour donner de la personnalité à ce nouvel LP qui ainsi se rapproche pas mal de Raein... Le split était-il un teasing inconscient de ce que la bande nous préparait ?

Nul ne sait de quoi est fait l'avenir et c'est d'autant plus vrai avec un disque de Loma Prieta. Singulier dans son ensemble, difficilement comparable à ce qui se joue actuellement sur la scène screamo, aussi captivant que complexe, rien n'est reprochable à ce disque pour les amateurs de punk hardcore original, abrasif et cinglant. Peut-être un peu trop de saturations et d'abstractions encore une fois pour rendre le tout réellement mémorable, et les hymnes à la vie et au désespoir de IV manquent cruellement, mais il y existe tout de même des instants d'intensité exaltants ("Satellite" est un final grandiose), qui peuvent en eux-mêmes suffir à donner envie à l'auditeur de revenir explorer ces nappes sonores clair-obscures...

Sur IV, Brian Kanagaki (guitare/chant) hurlait : "This torn portrait was out of focus"... Et si Self Portrait était finalement une réponse à l'album précédent, à ce titre fataliste et grave qui y figurait, au climat qui régnait dans l'esprit des musiciens ?

Bisous.





English translation :

This album pisses me off. Not because it's boring, but because I have troubles to find the words to begin my review, so I'm writing stuff as it comes to mind when I finally had inspiration to describe the new album of Loma Prieta. In truth, this album is really cool. It represents a logical following between IV, a catharsis of men in full mental and musical research, and the 7" split with Raein where they've reached the peaks of violence and dissonance. As the years progressed, the more their music drowning in saturation and distortion. Then we asked ourselves how our ears were whistling with the next release, and what Loma would looks like in 2015 with the highly anticipated Self Portrait. So, this album, a blur selfie of a band that would finally put to noisecore or a clearer picture, at the height of the band's career? It turns out that it's just a kind of synthesis of what Californians play and listen for 10-year career. In the end, as usual with them, it's a more or less complex but melodic-drived record.

Yeah, it was never easy to listen to an LP of that band, except with Last City where the sound in general is very clear, and where the musical richness, inventiveness and emotional discharge of this continue to impress. But otherwise, at the first listening for the common of punks, a Loma Prieta record is too noisy to enjoy the melodies or too chaotic in general. A good number of people and unleash the case, I think especially to kids who used to see them in first part of bands of the Wave like Pianos Become The Teeth, Touché Amoré, but these guys don't give a fuck about it and play what they like. They are not in Deathwish Inc. for nothing! And  this band has always found its audience. Self Portrait is an album where the boys confides to us, where the band is himself one more time, always sensitive and passionate, but knows how to make violence and disorder. He likes to deliver life-saving songs ("Love", "Nostalgia" and its surprising delicate voices on the outro), to confuse the issues (the excellent "More Perfect"), and doesn't hesitate to switch to a kind of crappy and dissonant garage punk like in "Merciless". The clear voice even reappeared (on Last City, there was already a verse sung on the eponym track), but this time it's more concrete, giving with the catchy choruses and the most ethereal phases of the LP something radiant, and pretty new since Last City. So Loma Prieta has not sunk in blind darkness, but has diversified his sound, open up a little more, and brought even less interest in screamo "codes".

Concretely, in terms of emotional feeling and pure musicality, IV was more catchy and more direct. Perhaps you remember the skramz-hit "Fly By Night" or the incredible duo "Uniform" / "uselessness"? Choruses and lightness that appearing on Self Portrait must fill this gap in principle, but we got used to this more frontal side of the previous disc, making it the most gross LP of the band... OK, I lost myself in my very own opinions haha, but I'm pretty sure that most of you have loved IV much as I love it... The band may need this "lightness" in their sound to go further, to give personality to this new LP which strongly remind Raein stuff... Maybe the split 7" was an unconscious teasing of what the band prepared us?

No one knows what the future is made and this is especially true with a Loma Prieta record. Singular as a whole, hardly comparable to what is currently playing on the screamo scene (yeah, except Raein), as captivating as complex, nothing reproachable in this LP for lovers of original, abrasive and scathing hardcore punk. Maybe a little too much saturation and abstractions again to make everything really memorable, and hymns to life and despair of IV sorely lacking, but there are still moments of exhilarating intensity ("Satellite" is a GREAT and epic final), which can in themselves be enough to give the listener the envy to come back and explore again these clear-obscure soundscapes...

On IV, Brian Kanagaki (guitars/vocals) screamed : "This torn portrait was out of focus"... And if this album was ultimately a response to the previous album, this fatalistic and severe track that appeared in this record, the climate that prevailed in the minds of musicians?

XOXO.

jeudi 15 octobre 2015

Hightower ne rit pas avec le diable, mais plutôt de son bad-buzz.



Putain, cette photo est parfaite. Je voulais faire un montage qui consistait à mélanger une photo promo du groupe et une autre image d'une photo d'un crew random de banlieue parisienne, puis j'ai trouvé ceci sur leur webstore. Moi quand je vois cette photo, un couplet me vient en tête : "Comme une balle sortie du canon scié, bâtard tu nous vois pas venir, combien rêvent-ils de me voir mort sur scène ? Dis moi, combien veulent me finir ? "Tous les punks sont dead depuis le dernier Jawbreaker, venu découper des têtes eh ouais j'y mets le fire, car ici c'est 7-5 Paname Nord, tu sais d'où vient les ti-peu qui remontent le score"PARIS. MOST. HATED. XVBARBAR x Hightower fraté, qui peut tester !...

... Bon OK, j'explique ce mash-up dégueulasse (et le remix conséquent que les vrais sauront reconnaître, et Dear You est génial btw) : l'un de mes frères est fan du trap-de-quartier jeu parisien, du coup quand je dors chez maman je découvre avec lui qui sont les protagonistes de la scène en dehors de Kaaris et de Lacrim, et qui en sont la relève, du côté plus underground des cités HLM. Ainsi, armé de mes connaissances, de temps à perdre et de ma connerie, j'ai décidé de lier pop-punk et trap dans cette review parce que je suis tout simplement un peu barré, et que les deux parties partagent potentiellement le même taux de canailleries et de commentaires négatifs à leur égard. Et l'un des barbares vend peut-être de l'herbe à l'un des punxs qui sait ? (vous l'aurez compris, le straight-edge level sera quand à lui absolument nul sur cet écrit).

J'avais prévu de chroniquer ce disque lors de sa sortie. Puis finalement, comme pas mal d'autres reviews, c'est passé à la trappe... Jusqu'à ce que je reçoive un mail de Jérémie me proposant de chroniquer l'album dont il est question ici, ça m'a remotivé à écrire. Ainsi, voici l'histoire du vilain petit canard 2k15 du punk parisien, qui contrairement à ce que peut laisser croire la photo n'est pas un groupe de beatdown allemand. Il était une fois lors du dernier concert de Into It Over It à Paris, en 2013, un groupe local qui devait ouvrir pour le groupe d'Evan Weiss, un truc dont je ne savais rien et dont je ne trouvais aucun morceau sur le web. C'était vendu comme du pop-punk/indie qualité, alors j'ai attendu de découvrir ça en live, puis j'ai entendu/lu des histoires assez chelou les concernant ce même soir où ils n'ont finalement pas joué, pour des histoires à base de menaces physiques à leur encontre.

Plus tard, je les ai enfin vu en première partie de Nai Harvest, qui jouait avec Turnover quand c'était pas encore du pop-rock chorusé soporifique. Ils n'avaient pas encore sorti de disques, mais avaient déjà du merch. J'avais franchement bien aimé leur musique, mais détesté leur attitude froide et trop assurée. Et puis une succession de trucs pas cool se sont accumulés dans mon newsfeed Facebook à leur propos : une interview sur Noisey ou ils descendent la scène punk française (j'ai moi-même été contre certaines de leurs idées), un report hilarant que je ne citerais pas de leur first part pour Rise Of The Northstar ou le public et le chroniqueur n'avaient strictement rien compris au délire des parisiens et visiblement au punk en lui-même, et une histoire qui a pris des proportions absurdes ou une organisatrice anglaise et le groupe se renvoyaient la balle sur la conception du féminisme de chacun (honnêtement, après avoir scrupuleusement lu les deux pavés, je n'ai finalement rien compris au débat et il est beaucoup trop flou pour en tirer une quelconque conclusion plausible)... En gros, aujourd'hui, Hightower est devenu pour certains le successeur de Kickback dans la capitale au niveau de la mentalité, faisant ainsi concurrence avec Cowards, ces derniers n'étant pas spécialement fans de Hightower, soit-dit en passant. C'est peut-être un peu abusé, non ? Les mecs de Hightower n'en sont pas encore à lancer des doigts d'honneur et des chaises à son public, ni à écouter du black metal de couleur bleu marine. (Est-ce que Nadine Morano est une variante de bleu ?)

Mais savez-vous que derrière ces faits salaces se cachent Sure. Fine. Whatever., un premier album qui, que tu le veuilles ou non, est plutôt cool ? Je l'ai écouté avant l'histoire du "why hardcore sucks", et je l'ai trouvé bien efficace. Pour le composer et le défendre, les mecs n'ont pas perdu de temps et s'en sont donnés les moyens : gros son, grosse prod, gros rendu, gros trajets. Les mecs ont bougé en Californie se faire enregistrer ni plus ni moins que par Steve Evetts, le mec qui a produit une impressionnante liste de groupes : The Cure, Sepultura, Snapcase, Glassjaw, The Dillinger Escape Plan, Kid Dynamite, et un de leurs groupes préférés, Lifetime, qui a produit ce disque. Pour défendre cette galette, les parisiens tournent déjà pas mal en Europe, tout en continuant de faire des dates de hardcore pas sympa dans les caves de la capitale genre Merauder, où en ouvrant pour Turnstile à la Mécanique Ondulatoire (où j'espère qu'ils ne joueront plus jamais, aussi cool que soit ce groupe). Alors, Hightower, du negative pop-punk ? C'est sûr qu'ils doivent moins facilement partager leurs pizzas que ceux qui écoutent Man Overboard sachant qu'on a quand même un ex-Providence aux fûts, mais ce premier album n'est pas pour autant moins ensoleillé et catchy qu'un bon Hello Bastards ! C'est motivant, c'est heartfelt, ça braille sec, y'a même quelques plans légèrement "moulinade", tout ce qu'il faut pour faire son sport sous le soleil ou pour chiller avec tes potes. Dès le premier morceau, "Aqua Tiger", tu es mis en condition avec les éléments cités plus haut, un face à face avec un tube pop-punk/mélo hardcore à la bien, quelque part entre le soleil du Groezrock (parce que c'est aussi bien produit d'une headline de ce fest t'as vu) et la sueur des caves parisiennes. Ça ressemble par moment à du Gnarwolves en moins "rien à foutre", à du Title Fight jusqu'à l'album Shed (rien que "1076" te le prouvera)... En se plongeant dans les paroles de l'album, on se rend compte que tout n'est pas si sunny que ça dans ce disque, en témoigne le texte de "Under A Funeral Moon", qui contraste avec l'ambiance générale du disque et du morceau-même : "If there was a light in the morning, maybe someday it could mean something more, sleep is a chain I deal with, troubles I have are not meant to be wrong. Silence is all that's left to meeeeeee!" *insère un sing-along ici*. Le moment ultime de l'album s'appelle "Cobblepot", 1mn45 straight to your face avec des riffs qui restent en tête, ça va droit à l'essentiel, c'est BON. "I'm waiting for the cold to go, ten years of a threatening sky, reminds me of a place I know, warm tears slowly fall to the ground!"

Alors je revois venir certaines personnes me dire "ouais mais les mecs se la pètent vachement pour pas grand chose parce qu'au final ça ressemble à plein de trucs". Bah... Le pop-punk en règle générale n'est pas super original hein, gringo. Il suffit juste de savoir bien le faire ou non pour que ça sorte du lot. Eux savent le faire à l'américaine, avec de l'arrogance et du culot certes, ça énerve pas mal de monde mais ça doit bien les faire marrer au final. Peut-être un peu comme XVBARBAR au final (bientôt le split 7" dans les bacs les frères, vendu sous le manteau à clicli et à la Méca). Ils auraient pu faire comme tout le monde depuis deux ans et rentrer dans la street cred' du moment en faisant du grunge et du shoegaze mais non, ils préfèrent distiller du fun pour de vrai. why so serious ? Quoi qu'il en soit, ils ont bien digéré leurs influences, ils jouent leur musique pour s'éclater sans se prendre la tête et la vider des soucis quotidiens, partager le micro avec les kids qui le voudront bien, et c'est l'essentiel. Un peu trop calibrée à mon goût mais ça se laisse apprécier tout seul, surtout quand tu sais pas quoi mettre en soirée et que tu veux pas saouler tes potes avec ta série de groupes de screamo suédois déprimant que tu t'écoutes passionnément en boucle depuis une semaine (genre moi au moment où je finalise cette chronique). N'écoutez pas ce groupe si c'est pour chercher une leçon de morale, Hightower n'est pas Orchid, sauf pour cette phrase : dance tonight, revolution tomorrow.

De toute façon, rien que parce que ce groupe fait porter son merch à une femme-furet, il devient par conséquent plus cool que le tien.


Bisous.